Gloire et déchéance des grandes puissances
Rachman Tom, Paul Gagné, Lori Saint-Martin
Tooly Zylberberg, propriétaire d’une petite librairie dans la campagne galloise, passe le plus clair de ses journées à lire. Mais un récit essentiel continue à lui échapper, tapi dans l’obscurité : celui de sa propre vie. Enfant, elle a été arrachée à son foyer, puis trimballée en Asie, en Europe et aux États-Unis. Mais pourquoi l’enlever – et l’élever – si c’était pour ensuite l’abandonner ?
Aussi, quand un message au sujet de « son père » lui parvient soudain, c’est sans hésiter que Tooly se lance dans une course-poursuite à la recherche de la vérité. En route, elle percera les secrets de Paul, l’informaticien errant qui préfère les oiseaux aux humains ; d’Humphrey, ce vieux grincheux qui lui a transmis l’amour des livres dont nul n’est le héros ; et de Sarah, flamboyante bohème aux humeurs changeantes… mais surtout de Venn. Venn, meneur charismatique qui a modelé Tooly à son image et lui a fait vivre les plus folles aventures. Jusqu’à ce que, sans crier gare, il disparaisse.
Bien que gratifiantes, ces errances nostalgiques – qu’elle n’entreprenait jamais qu’après quelques verres – suscitaient en elle un malaise. Comme si on avait introduit dans son être une longue cuillère et qu’on la remuait. Contrairement aux livres, Internet n’avait pas de dernière page. Qu’une chaîne sans fin qui la laissait fatiguée, tendue, la faisait veiller trop tard.
À moitié debout déjà, elle réveilla l’ordinateur, guidée par la promesse de satisfaction qui se dissimulait toujours derrière le clic à venir. Dans le coin supérieur gauche de l’écran était apparu un drapeau, une demande d’ajout à sa liste d’amis Facebook. En raison du pseudonyme qu’elle utilisait, ces demandes venaient toujours de rôdeurs des plus louches. Elle cliqua sur l’icône, déjà prête à refuser la proposition.
Sauf que le nom lui était familier : Duncan McGrory.
Quelques instants plus tard, elle reçut de lui un message : « Je tente désespérément de te joindre. On peut parler de ton père ? ? ? »
Elle tordit ses mains moites, les essuya sur son chemisier. Son père? De qui parlait-il, au juste?